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Andilly - Rue du Grand Moulin


Achevée au mois de novembre 2022, la fouille préalable à la construction du lotissement Simone Veil, rue du Grand Moulin à Andilly, est intervenue à la suite d’un diagnostic réalisé par S. Vacher (Vacher 2022). Malgré une densité archéologique assez faible sur les 7300 m² de l’emprise de fouille, l’opération a permis d’étudier les vestiges d’un enclos avorté de La Tène C2/D1, offrant l’opportunité rare de documenter un chantier d’édification d’enclos.
Le site prend place sur un plateau en bordure sud du golfe des Pictons, en pays d’Aunis, dans un contexte marqué par des langues de terre émergées entourées de mer et de marais qui témoigne, à travers une dense occupation diachronique, de l’attractivité et du dynamisme économique de la région. Durant La Tène, le pourtour du golfe est ainsi ponctué de nombreux sites à enclos fossoyés dont l’économie apparaît favorisée par la production de sel. C’est notamment le cas du site de la Rue Saint-Nicolas, à moins de 200 m au nord-ouest de celui de la Rue du Grand Moulin, dont l’occupation, débutée à l’âge du Bronze puis marquée par une vocation funéraire au premier âge du Fer, prospère durant La Tène à travers un habitat enclos de statut intermédiaire inscrit dans le giron d’activités salicoles (Vacher 2015). Ce foyer de population est aussi celui qui fréquente le site de la Rue du Grand Moulin qui ne peut être appréhendé qu’à travers un lien de dépendance au premier.
La seule trace de fréquentation antérieure à l’enclos correspond à un petit dépôt en fosse de rejets culinaires daté du premier âge du Fer, marqué notamment par un lot de rachis d’engrain. C’est donc sur un terrain inoccupé que trois sections de fossés, déterminant les bases d’un enclos probablement quadrangulaire qui ne sera jamais achevé, sont creusées à La Tène C2/D1. Deux fossés rectilignes (FO1072 et FO1071), conservés sur 1 à 1,50 m de profondeur et articulés en angle presque droit, sont associés à un troisième (FO1105), séparé des précédents par une interruption d’environ 4,80 m qui ménage l’entrée du futur enclos, mais dont la profondeur n’outrepasse pas 0,18 m. Le tracé de cette dernière section de fossé, dont la largeur est cohérente avec les précédentes, a en effet été marqué au sol uniquement par le retrait de la terre végétale et des premières plaquettes de substrat déchaussées, mais son creusement n’a pas été poursuivi. L’étude de la morphologie du creusement et des dynamiques de comblement des deux fossés profonds révèle que le creusement a été initié au niveau de l’angle et s’est achevé aux extrémités opposées, avant que les derniers mètres creusés ne soient immédiatement rebouchés à l’aide du matériau extrait, tandis que le reste du tracé a connu un comblement lent, typique de fossés ouverts. L’espace délimité par les fossés ne livre aucune trace de structuration.
La rareté du mobilier reflète le caractère inoccupé de l’enclos. Il provient très majoritairement du remblai de l’extrémité nord du fossé FO1071, dont la cohésion signale la rapidité de formation consécutivement à l’arrêt du chantier. En l’absence d’occupation antérieure, ceci conduit à associer le mobilier du remblai au temps du chantier, suggérant qu’il s’agit probablement des reliefs de la consommation des ouvriers. L’assemblage est tourné vers la consommation alimentaire, avec une domination des patelles, consommées pour leur chair, et la présence plus ponctuelle de viande de bovidé et peut-être de chien, associées à au moins deux individus de plaque de cuisson mobile et au moins trois récipients, un pot de stockage et deux vases ovoïdes à profil en S dont les tessons étaient répartis sur les 6 m de la longueur du remblai de l’entrée. Le reste du mobilier, en quantité très réduite, a été rejeté de manière sporadique dans le fossé au fur et à mesure de son comblement, signalant la faible pression anthropique sur le terrain après l’arrêt du chantier. Quelques rejets ponctuels, principalement de patelles, témoignent toutefois d’une fréquentation occasionnelle du site vraisemblablement liée à de l’exploitation agricole du terrain alors que les fossés sont laissés à l’abandon.
Le chantier d’enclos a été mis en œuvre durant les phases 3b ou 3c de l’occupation voisine de la Rue Saint-Nicolas (LTC2/D2a : 190-60 environ) et s’inscrit probablement dans la dynamique de réorganisation du site qui voit la mise en place de l’enclos B, signal du « renforcement du pouvoir ou du statut des occupants » (Vacher 2015 : 135), avant que le site ne soit marqué par une phase de régression qui conduira à son abandon et à la remise en culture du terrain (phase 3d : 60-30 environ).
L’opération de la rue du Grand Moulin offre ainsi l’opportunité rare de documenter une forme d’instantané sur un chantier d’édification d’enclos et d’interroger les modes d’implantation, les techniques de mise en œuvre et l’organisation du chantier. Depuis le constat simple que l’occupation n’a pas précédé la mise en œuvre des fossés d’enclos, jusqu’aux interrogations plus complexes sur les techniques de creusage, les délais et les moyens humains mobilisés, ces quelques données viennent enrichir les recherches relatives aux occupations encloses de la fin de la Protohistoire.

Bibliographie :
Vacher 2015 : Vacher S., Andilly, Rue Saint Nicolas 1 et 2 (Charente-Maritime). 4000 ans en bordure du Marais poitevin, le site de la rue Saint-Nicolas à Andilly, Rapport de fouille, Bègles : Inrap GSO, 2015, 3 vol., 775 p.

Vacher 2022 : Vacher S., Andilly, Rue du Grand Moulin. Un enclos protohistorique, Rapport de diagnostic, Bègles : Inrap NA&OM, 2022, 57 p.


Commune : Andilly

Adresse/lieu-dit : Rue du Grand Moulin

Département/Canton : Charente-Maritime

Année de fouille : 2022

Période principale d'occupation : Age du Fer

Autres périodes représentées : Antiquité

Responsable d'opération : Alexandre LEMAIRE

Aménageur : GPM Immobilier

Raison de l'intervention : Aménagement d'un lotissement

Type de chantier : Sédimentaire (Fouille préventive)