Notice_site

Arenthon - Route de Lanovaz


Cette opération d’archéologie préventive s’inscrit dans le cadre de la construction de plusieurs villas individuelles sur une surface totale d’environ 25 000 m2, à Arenthon (74), dans un secteur du centre du village très peu touché par les constructions récentes. Le village est situé à moins de deux kilomètres du cours de l’Arve, sur sa rive gauche, 20 km au sud-est de Genève. La campagne de sondages de diagnostic menée en 2016 a révélé un secteur d’un peu plus de 5 000 m2 recelant des vestiges antiques (fosses, trous de poteau, drains ou fondations de murs, ainsi qu’une mare comblée au début du 20e siècle et liée au château de la Sonnaz, qui se trouve sur une parcelle voisine). Prescrite par le Service régional de l’archéologie, leur fouille a été réalisée par la société Archeodunum du 4 septembre au 18 octobre 2017.

La première occupation reconnue date de l’époque romaine. Deux indices matériels indiquent toutefois qu’un gisement archéologique plus ancien existe sans doute à proximité. Une jatte en céramique et un bracelet en verre caractéristiques de La Tène finale ont été mis au jour respectivement dans une couche avec du mobilier du 1er s. ap. J.-C et dans la couche générale recouvrant le sommet des structures antiques.
Les vestiges de plusieurs bâtiments distincts suivant une orientation semblable se concentrent le long de la bordure nord-ouest du périmètre de la fouille. Seule la limite au sud-est, qui correspond à l’arrière des constructions, est assurée. Le site se poursuit en effet dans les trois autres directions hors de l’emprise du projet. Dans le secteur documenté (une partie a été retirée de la prescription en cours d’opération), la moraine fluvio-glaciaire a fait l’objet de terrassements pour créer des surfaces planes. Les plans partiels d’au moins trois bâtiments ont été restitués pour la phase 1, dont le début est fixé par le mobilier au cours de la période tibérienne. Ils se caractérisent par la présence systématique d’un espace dévolu au travail de la métallurgie, attesté par des éléments magnétiques prélevés dans les sols ou les couches de démolition, au moins un outil (un ciseau en fer), quelques scories et des foyers (fig. a). Situé à l’arrière de celui-ci, un second local est visiblement réservé à l’habitat, comme en témoignent les foyers associés à un terrazzo dans un cas, ou à des parois couvertes d’enduits blancs ornés d’un trait rouge horizontal dans un autre. Si les locaux observés dans leur totalité sont de taille modeste, l’un d’entre eux se distingue par des dimensions plus importantes. Avec deux foyers quadrangulaires disposés sur un sol de terre battue riche en rejets magnétiques, il s’agit sans aucun doute d’un vaste atelier (fig. b). Les techniques de construction mises en œuvre pour cette phase sont plurielles, parfois au sein d’un même local. Si les élévations étaient toutes en matériaux légers, leur partie inférieure pouvait être des sablières basses, des solins ou des murs de pierre sèche.

La phase 2 est marquée par la reconstruction totale de ces bâtiments, après un remblaiement des locaux précédents et un rehaussement des sols de quelques dizaines de centimètres. Si ces travaux semblent tous avoir eu lieu dans le dernier tiers du 1er siècle, ils ne sont visiblement pas strictement contemporains, ce qui démontre une évolution indépendante de chaque entité.
Le plan des quatre bâtiments reconnus pour la phase 2, plus partiel, se limite généralement à un seul local. Si le travail de la forge a peut-être perduré, il n’est plus assuré. En revanche, un lot de pesons disposés au sommet d’une fosse et des alignements de petits trous de poteaux (traces de métiers à tisser ?) creusés dans un sol de graviers liés au mortier suggèrent une activité de tisserand (fig. c). Un autre local, de plus grande taille, pourrait avoir été un entrepôt. Les murs de la phase 2 se distinguent par leurs fondations maçonnées, pour trois édifices sur quatre. La seule exception est un édifice reposant sur des solins.
Une partie de cet habitat antique n’a pas été fouillé après le décapage mécanique et a été retiré de la prescription. Les quelques tracés de murs ou de solins apparus ainsi que les quelques couches observées, charbonneuses pour la plupart, suggèrent que nous avions affaire au même type de constructions.
Ainsi, c’est un alignement de maisons s’étendant sur au moins 30 m de longueur qui se dessine. D’orientation similaire, elles devaient toutes s’ouvrir au nord-ouest, sur un espace viaire ou une cour. Si le tracé de la route actuelle, qui suit la même orientation, pouvait correspondre à cet axe antique, il n’en existe pas de preuve matérielle. L’association d’ateliers métallurgiques et d’habitats dans des bâtiments presque collés les uns aux autres mais suivant un développe- ment qui leur est propre nous conduisent à privilégier l’hypothèse d’une petite agglomération pour l’identification du site antique d’Arenthon.
Une fosse contenant un dépôt secondaire de mobilier contemporain de la phase 2 a été mise au jour une centaine de mètres au sud des bâtiments. Les caractéristiques de la céramique, du verre et de la monnaie qui le constituaient, tous brûlés, le rapprochent des rites de la crémation. Aucun os humain n’en faisait toutefois partie.

Ce secteur d’habitat est sans doute abandonné dans le courant du 2e siècle, peut-être même avant 150 apr. J.-C. Dans le périmètre des vestiges fouillés, seules deux structures de combustion en fosse, datable de l’Antiquité tardive ont été attribuées à une troisième phase d’occupation. Elles sont à associer à un groupe de vestiges (trous/bases de poteau, fosses, structures avec des fragments de tuiles antiques) mis au jour au sommet d’une couche de colluvions scellant l’habitat antique dans la partie orientale du périmètre décapé. Situés dans le secteur retiré de la prescription, ils n’ont pas été fouillés. Des datations par radiocarbone et la présence de fragments de pierre ollaire indiquent qu’il s’agit d’une occupation tardo-antique et/ou alto-médiévale qui se poursuit dans les parcelles voisines, à l’est.

Dans le secteur sud, plusieurs éléments mis au jour sont en lien avec le château de la Sonnaz, situé à proximité immédiate. Un long mur de pierre sèche (fig. d) borde une vaste dépression de forme arrondie, comblée par des sédiments sablo-argileux marqués notamment par la présence ponctuelle de coquilles. Ces deux aménagements se développent hors de l’emprise de la fouille. Elles correspondent à l’aménagement d’un petit étang visible sur la mappe sarde (1735/1745) et le cadastre français (1860). Dans une partie de ce secteur, le décapage mécanique s’est poursuivi sous les comblements de l’étang, pour atteindre la limite occidentale d’un vaste creusement plus ancien. Ses extensions ne sont pas connues, mais il est tentant de le rapprocher d’éventuels systèmes de défense médiévaux du château. Les investigations n’ont toutefois pas été poursuivies dans ce secteur.
Enfin, sur l’ensemble du périmètre, de nombreux drains empierrés, souvent linéaires, ont été repérés. Si tous n’ont pas livré du mobilier, ils paraissent pour la plupart d’époque moderne ou récente.


Commune : Arenthon

Adresse/lieu-dit : Route de Lanovaz

Département/Canton : Haute-Savoie

Année de fouille : 2017

Période principale d'occupation : Antiquité

Autres périodes représentées : Moyen Âge

Responsable d'opération : Clément HERVE

Aménageur : HOLDING NAEGELEN SARL

Raison de l'intervention : Construction de logements/projet immobilier

Type de chantier : Sédimentaire (Fouille préventive)