Brioude - Place du Postel
Du mois de décembre 2017 à la fin du mois de mai 2018, le suivi des travaux réalisé sur la place du Postel a permis de documenter les niveaux stratigraphiques qui se sont accumulés depuis la période laténienne jusqu’à nos jours. Cinq phases d’occupation ont pu être déterminées.
Phase 1 : L’occupation protohistorique
Cette phase correspond à l’occupation laténienne qui se développe sur la partie haute de la terrasse alluviale, au sud de la zone investiguée, entre la fin du IIe s. av. J.-C. et le tout début du Ier s. ap. J.-C. Trois sous phases d’occupation ont été distinguées. La première (phase 1a), correspond à l’implantation de quelques structures en creux assez éparses et au développement d’un probable premier niveau d’occupation. L’espace semble se structurer durant la phase 1b par l’installation d’un niveau de sol et d’un niveau de remblai à hauteur de ce dernier. Une série de niveaux d’occupation et/ou circulation semblent associés à cette sous-phase. La dernière, phase 1c, se caractérise par l’installation de structures en creux et d’une incinération dans les niveaux de la phase 1b, sur lesquelles un niveau de galets daté de La Tène D2b à la période augustéenne prend place.
La structuration et la nature de cette occupation située à la limite septentrionale d’une occupation plus vaste et mal caractérisée, n’ont pas pu être appréhendés du fait des conditions d’observation (unique vision en coupe des vestiges). Il apparaît néanmoins que la position stratégique de ce lieu laisse pressentir une occupation potentiellement importante. Elle est en effet installée en hauteur et à proximité d’axes de communication importants qui relient les territoires arvernes et vellaves, la voie dite Regordane qui existerai depuis au moins l’Antiquité, et l’Allier, qui devient navigable à hauteur de Vieille-Brioude au sud. Le point de franchissement de ce cours d’eau se ferait également à ce niveau.
Phase 2 : L’occupation antique
L’occupation antique qui succède à l’occupation laténienne, se développe en deux temps (phase 2a et 2b). Un premier niveau de remblai est installé sur les niveaux sus-jacents au cours des Ier-IIe s. Une série de structures en creux de taille variable est ensuite aménagée dans ce niveau. Des niveaux sédimentaires correspondant probablement à des niveaux de construction ou de démolition marquent la fin de cette sous-phase. Un niveau de remblai vient sceller le comblement de ces structures au cours des IIe-IIIe s. au début de la phase 2b. Une série de structures en creux semblables à celle de la phase 2a sont à nouveau implantées et constituent les derniers vestiges identifiés pour l’Antiquité. A l’exception du niveau de remblai de la phase 2a qui s’étend jusqu’au sud de la zone de fouille, l’occupation antique, dont les limites septentrionales ne semblent pas avoir été atteintes, se concentre au centre de l’actuelle place du Postel. L’absence de structures au sud peut s’expliquer par un arasement des vestiges ou, moins probable, par un non-investissement du secteur.
Notre site, dont la structuration et la nature n’ont pas pu être déterminés du fait des contraintes évoquées (supra), se situe à la limite septentrionale d’une occupation antique plus vaste aux contours et à la nature encore flous. Le débat autour de la question d’un vicus ou d’une villa antique dans cette zone de confins du territoire arverne n’est toujours pas tranché.
Phase 3 : La nécropole alto-médiévale
Son environnement
Pour G. Fournier la place du Postel était incluse dans les remparts primitifs du vicus alto-médiéval, dont l’accès se faisait à l’est, par l’actuelle rue de la Gazelle. Il défend l’idée d’un vicus bipolaire avec un noyau situé autour de la basilique Saint-Julien au nord et un noyau autour du castrum Vctoriacum mentionné par G. de Tours, au sud, sur la place du Postel. Les deux opérations archéologiques menées sur la place n’ont pas permis de retrouver la trace de ces éléments. De plus la stratigraphie relevée ne correspond à aucun moment à celle d’un quartier urbanisé.
Nous sommes donc plutôt là en présence d’une nécropole suburbaine qui doit probablement se situer à proximité de la voie d’accès au vicus sans qu’aucune trace archéologique n’en ait, à l’heure actuelle, été recensée. La question d’une église ou d’un oratoire comme élément polarisateur de l’ensemble est également à soulever bien qu’aucun édifice de ce genre ne subsiste dans les mémoires à cet endroit.
La contemporanéité de l’ensemble avec l’apogée du culte dédié à Saint-Julien est intéressante à noter car bien qu’aucun lien direct ne puisse être établi avec certitude entre les deux, il est possible que la forte affluence de pèlerins durant cette période ait nécessité l’ouverture de nouvelles aires funéraires pour accueillir les défunts. L’abandon de la nécropole coïncide avec le déclin du culte à Saint-Julien et sa reprise en main par le chapitre de Brioude qui va, de façon nette, provoquer un remodelage de la topographie urbaine.
Les données issues du suivi
Une nécropole est installée sur les niveaux antiques après un hiatus chronologique dans l’occupation qui s’étend de la fin du iiie s. à la fin du viie s. au plus tôt. Cette période correspond au moment où l’habitat semble se polariser autour du tombeau de Saint-Julien, au nord de notre zone de fouille.
D’une surface minimale de 2200 m², cet ensemble contient un potentiel d’au minimum 600 sépultures. Notre opération a permis d’en repérer 59 installées au cours d’au moins trois phases successives d’inhumations, depuis la fin du VIIe s. jusqu’à la fin du Xe s. au plus tard.
Ce sont au total 63 individus qui ont été exhumés. Deux d’entre eux étaient en position secondaire, tous les autres en position primaire. A l’exception de deux sépultures doubles, ce sont toutes des inhumations individuelles. Lorsque cela a pu être déterminé, ils ont en majorité étés inhumés dans une enveloppe souple (linceul), en décubitus dorsal avec la tête au sud-ouest. Quelques orientations diffèrent cependant marquant ainsi peut-être d’autres phases d’inhumations qui n’ont pu être appréhendées.
La population enterrée compte 37 adultes, dont trois individus de sexe masculin et six de sexe féminin, un sujet à la charnière entre immature et adulte ainsi que 20 immatures. L’âge au décès n’a pas pu être déterminé pour cinq individus. L’évaluation de l’état sanitaire montre une population adulte touchée par des lésions osseuses dégénératives (arthrose, nodule de Schmorl) ou traumatique (fracture). Les dents des sujets immatures présentent des lésions carieuses et du tarte. Les individus adultes, en plus de ces lésions, sont touchés par des pertes de dents ante-mortem, l’usure dentaire et la parodontose.
D’après la densité des sépultures à l’ouest de la zone de fouille et les datations obtenues par 14C, il semble que la nécropole se développe d’ouest en est et atteigne son extension maximale entre le VIIIe s. et le Xe s.
Phase 4 : L’occupation médiévale
Ce remodelage est perceptible à travers l’installation du fossé d’enceinte au cours du XIIIe s. situé au nord-ouest de la zone de fouille.
Cette phase regroupe également un ensemble de structures médiévales postérieures à la nécropole et donc au Xe s. Mal datées, ces structures en creux de grandes dimensions, sont immédiatement antérieures à la mise en place du niveau de sol de cailloutis attribué à la phase suivante. Il est possible d’envisager l’hypothèse de fosses d’extraction de grave, matériaux qui pourrait avoir servi pour la construction de ce premier sol.
Phase 5 : L’occupation moderne et contemporaine
C’est à cette phase que sont attribués, en l’absence d’éléments datant et donc à défaut, des niveaux de sol, de recharge et de remblais qui se sont succédé de la période médiévale jusqu’à nos jours sur l’ensemble de la surface de la place, matérialisant ainsi un vaste espace ouvert comme une grande place. Entre ces niveaux s’insèrent des structures en creux et les fondations d’un bâtiment, dont le plan apparaît sur le cadastre napoléonien, qui s’élevait au nord de la place. Nous avons pu repérer ses murs de façade nord-ouest et sud-ouest ainsi que deux murs de refend, un puits et le départ d’une cave voûtée.
Revue de presse :
Commune : Brioude
Adresse/lieu-dit : Place du Postel
Département/Canton : Haute-Loire
Année de fouille : 2017
Période principale d'occupation : Age du Fer,Moyen Âge
Autres périodes représentées : Antiquité,Période moderne,Epoque contemporaine
Responsable d'opération : Géraldine CAMAGNE
Aménageur : Mairie de Brioude
Raison de l'intervention : Restauration/Réhabilitation d'un bâtiment historique
Type de chantier : Sédimentaire (Fouille préventive)