L’étude archéologique et documentaire vise à poursuivre le travail réalisé sur la charpente par Émilien Bouticourt en 2014. Le premier objectif de notre intervention était de suivre la dépose de la couverture en tuiles afin de compléter les observations réalisées sur la charpente et notamment, son lien avec les différents systèmes d’évacuation des eaux de pluie. Le second objectif était de saisir cette occasion pour réaliser des relevés et une analyse en pied de mur des murs extérieurs, afin de proposer une amorce de chronologie relative.

    

Le château de Cabannes était, au XIII^e-XIV^e siècle, composé d’un corps de bâtiment rectangulaire qui devait se prolonger à l’ouest, comme le prouve l’amorce d’une fenêtre sur l’extrémité ouest du mur sud ou encore l’arrachement d’une tour d’escalier sur le parement nord. Ces éléments suggèrent la présence d’un bâtiment accolé au corps principal. D’après une représentation du château datée du XVIII^e siècle, ce dernier aurait été flanqué d’une tour sur sa partie occidentale.

Lors du suivi de travaux, les arases des murs gouttereaux du château ont été dégagées des tuiles qui les recouvraient depuis les derniers travaux de réparation des couvertures. Ces zones présentent tout un système d’évacuation des eaux de pluie qui permet d’appréhender l’état initial de la toiture et ses modifications. Ce dispositif comprend deux éléments principaux : des dalles rainurées et des chéneaux. Les dalles positionnées à plat sur l’arase des murs gouttereaux permettaient de rejeter l’eau de pluie des deux pans de la toiture et de l’évacuer vers l’extérieur. À l’origine les murs gouttereaux se développaient au-dessus de l’arase des murs gouttereaux actuels et dissimulaient la toiture, comme le figure la représentation du XVIII^e siècle. Ainsi, les rainures rectangulaires creusées dans les dalles formaient des petits égouts disposés dans la continuité des pentes de la toiture servaient de chantepleures afin d’évacuer l’eau qui s’accumulait derrière le parapet. Sur la partie nord du bâtiment, les dalles rainurées sont en saillie et évacuaient l’eau directement vers le sol. Le système est plus élaboré sur le versant sud. L’eau ruisselait des dalles jusqu’à un dispositif de chéneau ancré et en saillie des murs. Ce dispositif, incliné d’ouest en est, déversait l’eau dans un second chéneau placé sur le mur pignon est. Ainsi l’eau était acheminée jusqu’à une gargouille dans l’angle nord-est de l’édifice. On remarque donc une différence de traitement entre la façade principale côté sud et la façade arrière, côté nord. Côté sud on remarque trois fenêtres en tiers-point et un système d’accès alors que sur le côté nord, il y a deux fenêtres à lancettes plus ostentatoires et aucune porte. Ainsi, le château possédait une façade sur cour au sud et une donnant sur l’extérieur au nord, expliquant alors le traitement différencié des deux façades et l’absence de contrainte concernant l’évacuation de l’eau sur la partie nord.

Par la suite, le château du XIII^e-XIV^e siècle a connu de nombreuses reprises, dont celle de sa charpente, datée de 1440-1450d, ayant changé le système d’évacuation des eaux de pluie. En effet, la modification du niveau de la faitière a nécessité le déplacement d’une baie sur le mur pignon est et donc la destruction partielle du chéneau. C’est à cette période que des rigoles et des trous ont été creusés dans les dalles rainurées du dispositif d’évacuation d’eau et que des gargouilles en pierres ont été mises en œuvre. Enfin, de nombreux travaux de reprises ont été réalisés entre le XVI^e et le XX^e siècle avec l’ajout de baies, la modification des circulations, la destruction de la tour du château, etc. Durant le XX^e siècle, le château a été réhabilité en logements et ce n’est que récemment qu’il a été complètement laissé à l’abandon.