Vienne - Eglise Saint-Georges
L'ancienne église Saint-Georges de Vienne est un édifice périphérique de l'abbaye Saint-Pierre de Vienne. Les vestiges sédimentaires, la nécropole et le bâti ont été étudiés de 1976 à 1985 par J.-F. REYNAUD puis par M. JANNETVALLAT dont la thèse soutenue en 1987 fait la synthèse des découvertes. Laissé tel quel depuis l’arrêt des fouilles en 1985, le bâtiment menaçant ruine a nécessité une intervention de consolidation et de remplacement de la charpente par la ville de Vienne, propriétaire du site. Cette opération a été l’occasion, sur prescription du service régional de l’archéologie, d’analyser à nouveau cet ensemble du point de vue de l’archéologie du bâti, trente-trois ans après la première étude.
L’opération n’a pas fondamentalement remis en question les acquis des études antérieures. L'église Saint-Georges conserve dans son mur gouttereau sud les témoignages de trois états successifs :
» L’épaulement du chevet de l’oratoire mérovingien (VIe s.) dont l’abside a été retrouvée en fouille.
» Un premier agrandissement vers l’Est à la période carolingienne (IXe-Xe s.). Une part significative de cette élévation est conservée, notamment deux baies à alternance de calcaire, tuf et brique et les vestiges de la chaîne d’angle du chevet.
» Une troisième phase fixant l’emprise actuelle du bâti au XIIIe-XIVe avec la création d’un chevet plat orné d’un triplet. Cet état conserve, dans sa moitié occidentale, l’édifice carolingien, ses baies et probablement son système de charpente.
Avec la perte de sa fonction religieuse à la période révolutionnaire, l’édifice est profondément remanié trois fois au XIXe s. faisant disparaitre les murs nord et ouest ainsi qu’une partie de l’élévation du mur sud par le percement de nombreuses baies.
Deux écueils empêchent une réutilisation des données anciennes d’archéologie du bâti : d’une part l’état de conservation d’une partie des relevés originaux, d’autre part le système de géolocalisation interne du site, basé sur la projection à l’extérieur du carroyage intérieur du bâti, système ayant provoqué des erreurs angulaires sur une partie des relevés. Cette situation a poussé l’équipe à reprendre intégralement la documentation et à effectuer un nouveau relevé manuel du mur, appuyé sur les moyens techniques modernes (niveaux laser, station totale, numérisation et DAO).
Outre l’évolution technique et méthodologique, c’est celle du regard et de l’analyse archéologique qui marque la différence entre les deux campagnes d’étude d’un même corpus : ainsi l’attention portée aujourd’hui aux traces des gestes des constructeurs et à la vie du chantier (planées rythmant l’érection du mur, restitutions des systèmes d’échafaudages, ancrage des entraits carolingiens, etc.), ainsi également l’étude, au même titre que les phases plus anciennes, des phases modernes et contemporaines du bâti.
Cette opération permettra à terme de reprendre avec prudence les éléments de datation, en s’appuyant sur la démocratisation des techniques de datation et surtout sur l’augmentation sensible des corpus publiés depuis, grâce notamment à la multiplication des opérations sur le bâti en archéologie préventive.
Peu visible dans la disposition interne ancienne du bâtiment, le mur de chevet du XIIIe-XIVe s. présente deux ensembles de peintures murales très inégalement conservées. La disparition d’un niveau de sol intermédiaire lors du chantier de destruction et le dégagement total du mur a permis d’effectuer un relevé à l’échelle 1 :1 de ces peintures – jusque-là uniquement décrite sommairement – par calque apposé contre le mur. Cette étude a permis de préciser l’identification du motif iconographique situé au nord du triplet, représentant Saint Christophe portant l’Enfant Jésus, et a vu la découverte, du côté sud, des vestiges fragmentaires d’une scène de crucifixion. Cette dernière comprend les éléments récurrents de ce motif iconographique : croix encadrée par une lune et un soleil anthropomorphiques en partie supérieure, par Saint Jean et la Vierge en partie inférieure.
Le style de la peinture nous permet de l’attribuer à la fin du XIIIe siècle ou au début du XIVe siècle, permettant d’envisager sa création dans le même mouvement que le dernier agrandissement de l’édifice. Le second motif iconographique, plus tardif, est moins bien conservé. Il comprend une série de drapés décoratifs recouvrant le programme iconographique antérieur et que l’on peut associer, sans plus de précision pour l’instant, à la période moderne.
La charpente du bâtiment, datée du XIXe siècle, n’avait pas intéressé les archéologues du XXe siècle ; sa destruction s’est déroulée sous le regard de ceux du XXIe siècle. L’occasion d’identifier plusieurs pièces médiévales en remploi, arbalétriers et contrefiches en chêne, chevrons et pannes en sapin. Elles témoignent d’une charpente à fermes diaphragmes datée par dendrochronologie du milieu du XVe siècle, une phase postérieure d’au moins un siècle au dernier état du bâti médiéval.
Cette opération marque le premier pas d’une étude et d’une mise en valeur de plus grande ampleur pour l’abbaye Saint-Pierre de Vienne et pour l’église Saint-Georges. La volonté de la municipalité d’installer sur le site son nouveau musée d’histoire permettra de mener une étude plus poussée des élévations conservées, dont une part significative est encore cachée sous les restaurations du XIXe siècle.
Commune : Vienne
Adresse/lieu-dit : Eglise Saint-Georges
Département/Canton : Isère
Année de fouille : 2018
Période principale d'occupation : Moyen Âge,Période moderne,Epoque contemporaine
Responsable d'opération : Quentin ROCHET
Aménageur : Ville de Vienne
Raison de l'intervention : Restauration du monument
Type de chantier : Etude du bâti (Fouille préventive)