Archives de catégorie : Moyen-âge

À Sahurs, une des plus vieilles églises de Normandie ?

À Sahurs, une des plus vieilles églises de Normandie ?

L’église Saint-Sauveur de Sahurs est nichée au creux d’une boucle de la Seine, à la limite entre l’Eure et la Seine- Maritime (fig. 1). Avant d’engager des travaux de restauration, les différents acteurs de ce projet (mairie, architecte) ont souhaité en savoir plus sur l’histoire de cet édifice.

Une équipe d’archéologues du bâti, spécialisés dans l’analyse de monuments conservés en élévation, est alors intervenue durant une semaine. Les résultats permettent de faire remonter l’histoire de l’église au début du xe siècle.

Fig. 1 : L’église de Sahurs avec son cimetière et la Seine en arrière-plan.
Fig. 2 : Façade nord de l’église : le phasage des maçonneries révèle plus de 1000 ans de transformations.

Un édifice composite

L’église de Sahurs montre une juxtaposition de styles architecturaux qui témoignent des modes des différentes époques depuis le Moyen Âge (fig. 2) :

  • Le centre de la nef, ainsi que le choeur sont les parties les plus anciennes : les petites baies hautes qui éclairent la nef sont caractéristiques de la période préromane (x-xie siècles) ; en revanche, la présence de trois contreforts qui scandent ses murs est une originalité pour  l’époque.
  • Trois arcades aujourd’hui bouchées ont ensuite été percées dans les murs de la nef (fig. 3 et 4). Leur fonction reste pour le moment énigmatique : donnaient-elles accès à des bas-côtés ou des galeries dont les vestiges ne nous sont pas parvenus ?
  • Le chevet a été fortement modifié par les restaurations du xxe siècle, mais ces dernières ont respecté la morphologie originelle (doubles colonnes, corniche ponctuée de modillons) que l’on retrouve à la période romane (XIIe siècle).
  • L’entrée, ainsi que les deux premières travées de la nef surmontées par le clocher, sont  typiques du style gothique flamboyant (début du XVIe siècle).
Fig. 3 : Façade sud de l’église, avec les arcades romanes bien visibles dans la partie centrale du monument.
Fig. 4 : Les arcades sont également bien conservées à l’intérieur de l’église.

La plus vieille église de Normandie…

… datée par radiocarbone à ce jour, grâce à l’analyse des charbons piégés dans les mortiers utilisés pour la construction de l’église (fig. 5). Les résultats ont révélé que le monument aurait  été construit au tout début du xe siècle, puis que les arcades de la nef auraient été percées  moins d’un demi-siècle plus tard.

Un décor conservé en place

En enlevant un bloc du comblement des arcades, les archéologues ont mis au jour un décor (fig. 6) : un damier sculpté venait orner les impostes (pierres sur lesquelles retombent les arcs). Ce motif de damier est typique de l’art roman. Sur une autre arcade, un décor plus simple a été observé. Les bouchages en maçonnerie ont sans doute piégé l’ornementation de chaque arcade.

Fig. 5 : Prélèvement de mortier pour des datations au carbone 14.
Fig. 6 : Un bloc orné d’un damier sculpté décorait une arcade romane.

Des résultats au service de la restauration

Cette étude s’inscrit dans le projet de restauration, qui en est à ses débuts : en intégrant les résultats archéologiques, l’architecte Marie Caron et son cabinet vont maintenant élaborer le projet en lui-même. En fonction des travaux envisagés, des études archéologiques complémentaires pourraient venir enrichir le dossier de l’église de Sahurs dans les prochaines années.

La restauration de l’église de Sahurs fait l’objet d’un appel à don de la Fondation du Patrimoine.

Expertise archéologique conduite en mai 2023 sur la commune de Sahurs, en préalable au chantier de restauration de l’église.

Prescription et contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie de Normandie.

Maîtrise d’ouvrage : Commune de Sahurs

Opérateur archéologique : Archeodunum (Responsable : Margaux Lainé)

Équipe

Margaux Lainé (RO)

Jean-Baptiste Vincent

Alexandre Polinski (pétrographie)

De ces pierres… Recherches archéologiques au prieuré de Ternay

De ces pierres, ils ont bâti leur église

Recherches archéologiques au prieuré de Ternay

L’église Saint-Mayol de Ternay (69) se dresse sur un promontoire surplombant la rive gauche du Rhône, ce qui la rend visible de loin particulièrement grâce à son clocher en briques (fig. 1). Afin d’entretenir cet édifice emblématique de son patrimoine, la mairie de Ternay a entrepris des travaux de restauration qui se sont déroulés entre novembre 2020 et décembre 2021.

À la demande du Service Régional de l’Archéologie, une étude archéologique du bâti a été réalisée conjointement à la restauration. Le chantier a concerné les extérieurs de la moitié orientale de l’église. Les archéologues ont aussi documenté des vestiges mis au jour dans les tranchées de réseaux aux abords de l’église. Ces recherches nous en apprennent plus sur les choix constructifs et sur l’histoire de l’édifice.

Fig. 1 : Vue aérienne du prieuré depuis le sud-ouest.
Fig. 2 : Plan de l’église. En rouge, les maçonneries plus anciennes (fond de plan : Sylvie Burki, géomètre-expert DPLG).

L’ancien prieuré de Ternay

L’église Saint-Mayol appartient à un ensemble prieural dépendant de l’abbaye de Cluny (fig.2). La fondation de cet établissement à Ternay remonte, d’après les sources écrites, à la deuxième moitié du Xe siècle au plus tard. L’église, quant à elle, présente des caractéristiques esthétiques qui permettent de placer sa construction au XIe ou au XIIe siècle (fig. 5). La manière dont s’est déroulé ce chantier au Moyen Âge, l’identification des matériaux et des outils utilisés par les bâtisseurs, la restitution des élévations originelles de l’église, sont autant de questions auxquelles l’équipe d’Archeodunum a tenté de répondre.

La pierre : des choix mûrement réfléchis

Les matériaux de construction sont diversifiés et révèlent un approvisionnement réfléchi, fondé sur une bonne connaissance de leurs caractéristiques techniques (fig. 4) :

  • Granite pour les pierres de taille des épaulements et des contreforts ;
  • Molasse pour celles de l’abside ;
  • Calcaire, tuf et brique pour les parties hautes ;
  • Tuf pour les voûtes, en raison de la légèreté de ce matériau.
Fig. 3 : Modillon sculpté de l’abside, représentant un acrobate.
Fig. 4 : Partie nord-est de l’églises, après restauration. On y distingue les différents types de pierre.

Deux mortiers pour deux usages

Le mortier le plus abondamment utilisé se caractérise par de nombreux graviers et cailloux (> 2 mm). Il est approprié pour les joints épais qui séparent les moellons. En revanche, les bâtisseurs ont souhaité réduire l’épaisseur des joints entre les pierres de taille. Pour ce faire ils ont utilisé une recette de mortier différente composée d’une charge sableuse (< 2 mm). Ces deux liants sont utilisés conjointement dans les murs et pour toutes les maçonneries du transept et du chevet (fig. 5), ce qui témoigne d’un approvisionnement maîtrisé du granulat, peut-être même anticipé pour tout l’édifice afin de ne pas en manquer. Il y avait donc au moins deux aires de gâchage durant toute la durée du chantier des parties orientales.

Les parties hautes des murs

Dès l’origine, les murs pignons s’élevaient légèrement au-dessus des toitures. Les parties hautes de l’église ont fait l’objet de nombreuses transformations au fil des siècles mais, au sud, la pierre sommitale du mur pignon est conservée : taillée à la manière d’un fronton dans du calcaire blanc, elle servait de socle à une sculpture aujourd’hui disparue (fig. 6).

Fig. 5 : Mortier sableux entre les pierres de taille de l’arc et mortier caillouteux dans l’appareil du mur.
Fig. 6 : Pierre sommitale du bras sud du transept.

Des traces de construction plus anciennes

À l’est, une maçonnerie passe sous l’abside. Cette structure, partiellement mise au jour au fond d’une tranchée, peut s’apparenter à un socle de fondation de l’église, ou bien être en lien avec un édifice plus ancien. Les archéologues ont mis en évidence d’autres traces de constructions antérieures. En particulier, le bras sud du transept a été construit en englobant un mur plus ancien : conservé sur une hauteur de près de 4 m, ce mur pourrait bien appartenir aux premiers bâtiments du monastère, antérieurs à la construction de l’église romane (fig. 7).

Fig. 7 : Mur ancien englobé dans la construction de l’église romane.
Fig. 7 : Mur ancien englobé dans la construction de l’église romane.

Opération d’archéologie préventive conduite entre novembre 2020 et décembre 2021
sur la commune de Ternay, en accompagnement du chantier de restauration de l’église Saint-Mayol.

Prescription et contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie d’Auvergne-Rhône-Alpes.

Maîtrise d’ouvrage : mairie de Ternay

Opérateur archéologique : Archeodunum (Responsable : Camille Collomb)

Équipe de terrain

  • Camille Collomb* (RO)
  • Audrey Baradat-Joly (Anthropologue)
  • Auriane Lorphelin* (Archéo. bâti)
  • David Gandia* (Anthropologue)
  • Guilhem Turgis (topographe)
  • Jessy Crochat (acquisition 3D)
    * Terrain et Post-Fouille

Équipe de post-fouille

  • Alexandre Polinski – Matériaux/Lithique
  • Cécile Rivals – étude doc.

Bon Baisers d’Autun, Archeodunum dans la saison 2 de Mission Archéo !

Bon Baisers d’Autun

Archeodunum dans la saison 2 de Mission Archéo !

Après un épisode consacré à notre chantier de Nort-sur-Erdre, Archeodunum a une nouvelle fois accueilli l’équipe de Passé Sauvage sur un de ses chantiers. Cette vidéo ouvre la deuxième saison de la série « Mission Archéo », et nous en sommes très heureux.

Les enjeux et les coulisses, bien réels, de notre opération au cœur d’Autun sont inscrites dans une enquête d’ « archéofiction », qui va irriguer toute la saison. Cette approche est un clin d’œil à Jean Rouch et à ses ethnofictions.

Archéologie à Bègues, un village multiséculaire

Archéologie à Bègues, un village multiséculaire

De l’architecture de bois aux murs en pierre

À l’automne 2022, une fouille archéologique s’est déroulée en périphérie du bourg de Bègues, en amont de la construction de maisons individuelles. L’opération a été réalisée par Archeodunum et le SAPDA (Service d’Archéologie Préventive du Département de l’Allier – CD03). Dans des conditions souvent brumeuses ou neigeuses, les archéologues ont découvert de nombreux vestiges témoignant du passé du village, depuis l’époque gauloise jusqu’au Moyen Âge (fig. 1 et 2).

 

Fig.1 : La brume et la neige ont souvent accompagné les archéologues.
Fig. 2 : Plan simplifié des vestiges.

Un village gaulois plus ancien qu’attendu

D’abord place forte gauloise (oppidum) puis agglomération gallo-romaine, le site de Bègues est connu de longue date et fait l’objet de nombreuses recherches. Pour autant, c’est la première fois qu’une fouille préventive est mise en oeuvre sur ce plateau qui domine les gorges de la Sioule (fig. 3).

Si aucun vestige du rempart de l’oppidum n’a été identifié, de nombreuses structures permettent de confirmer l’extension du village dans ce secteur du site. Des trous de poteau et vestiges de fondation témoignent de la présence de bâtiments en bois. En périphérie, des fosses-dépotoirs, un puits et un four de potier (fig. 4) nous renseignent sur les activités domestiques et artisanales pratiquées à la fin de la période gauloise (Ier s. av. J.-C.).

Fait remarquable, deux silos enterrés – initialement destinés au stockage des récoltes – ont livré de nombreux objets datés du IIIe s. av. J.-C. : c’est une période jusque-là inédite sur le site, ce qui permet d’envisager la naissance d’un habitat groupé antérieur à la création de l’oppidum.

Fig. 3 : Dégagement d’une fosse d’extraction, d’une cave et d’un four de potier. Les vestiges se distinguent très nettement sur le substrat rocheux.
Fig. 4 : Four de potier gaulois (ier s. av. J.-C.).

Un secteur périphérique de l’agglomération gallo-romaine

Durant l’Antiquité, l’occupation semble se rétracter sur cette partie du plateau. Peu nombreux, les vestiges gallo-romains ne correspondent pas à l’organisation structurée d’un habitat groupé. Un ancien chemin et deux petites carrières d’extraction de calcaire suggèrent que nous nous  situons en périphérie immédiate du village. Une cave (fig. 5), des fosses-dépotoirs et des trous de poteau de bâtiments matérialisent néanmoins quelques installations pérennes durant les Ier et IIe s. ap. J.-C.

Des souterrains taillés dans le rocher

Dans une zone particulièrement remaniée au fil du temps, Jérôme Besson et son équipe ont découvert un bâtiment semi-excavé gallo-romain, qui donnait accès à deux salles souterraines circulaires creusées dans un banc de calcaire particulièrement dur (fig. 6). D’une hauteur sous plafond de 1,50 m environ, ces deux salles communiquent par le biais d’un resserrement faisant office de porte. Tout porte à croire qu’il s’agit d’espaces destinés au stockage (fig. 7). Durant le haut Moyen Âge (VIIe – Xe siècles ap. J.-C.), le bâtiment est remanié et l’accès des caves souterraines est muré. Plus tard, une seconde entrée sera aménagée au nord au moyen d’un couloir à ciel ouvert taillé dans le calcaire. Cette modification d’accès fait supposer une utilisation de ces espaces souterrains sur un temps relativement long.

Fig. 5 : Dans une cave gallo-romaine, découverte d’un col d’amphore (ier s. ap. J.-C.).
Fig. 6 : Fouille au niveau de l’accès initial des galeries souterraines.

Des bâtiments médiévaux

Par la suite, ces caves sont abandonnées et la seconde entrée est bouchée. Deux bâtiments en pierre (fig. 8) sont construits durant le Moyen Âge (XIIIe – XIVe siècles). Ils disposent de pièces dallées et d’une cheminée. À proximité, plusieurs silos témoignent du maintien d’une activité de stockage.

Un riche patrimoine archéologique

Ces découvertes montrent une fois de plus la richesse du patrimoine archéologique de Bègues. Malgré une surface de fouille relativement restreinte (environ 1 500 m2), les différentes observations permettent d’esquisser l’évolution de l’extension du village au fil du temps, de périodes encore méconnues sur le site (début de la période gauloise) jusqu’au Moyen Âge.

Fig. 7 : Intérieur de l’une des salles souterraines. La morphologie de ces espaces a été documentée à l’aide de relevés laser.
Fig. 8 : Vue du bâti médiéval qui surmonte les anciennes galeries souterraines.

Opération d’archéologie préventive conduite en automne 2022 dans le bourg de Bègues (Allier), en préalable à la construction de logements.

Prescription et contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie d’Auvergne-Rhône-Alpes.

Maîtrise d’ouvrage : Particulier

Opérateur archéologique : Archeodunum (Responsable : Jérôme Besson) et Service d’Archéologie Préventive du Département de l’Allier.

Équipe de terrain

  • BESSON Jérôme* (RO)
  • LORPHELIN Auriane* (RA)
  • DIXON Kevin* (RA, SAPDA – CD03)
  • MARTIN Mathilde
  • CARBONE Antony
  • VALLEE Laurent
  • FLEURY Lara (SAPDA – CD03)
  • FAVART Claire (SAPDA – CD03)
  • BESSON Loriane* (SAPDA – CD03)
  • LABALME Maud* (SAPDA – CD03)
  • HEITZMANN Samantha (SAPDA – CD03)
  • GUILLAUD Lucas
  • KOWALSKI Jean-Baptiste (SAPDA – CD03)
  • CROCHAT Jessy (acquisition 3D)
    * Terrain et Post-Fouille

Équipe de post-fouille

  • LALLEMAND David (SAPDA – CD03)
  • LEPINE Guillaume
  • DUCREUX Aurélie
  • LEBLE Geoffrey
  • COLLOMB Camille
  • COLLOMBET Julien
  • FLOTTES Laurie
  • POLINSKI Alexandre
  • ALASCIA MORADO Marianne
  • CHAVOT Clément
  • CAMAGNE Géraldine
  • GILLES Amaury
  • PIGERON Olivier (Groupe Spéléologique Auvergnat)
  • CARAIRE Gabriel (Analyse Géophysique Conseil)

Enquête archéologique à Mende

Enquête archéologique à Mende

C’est dans le cadre de la redynamisation du centre-ville de Mende, plus spécifiquement du quartier du nouveau musée du Gévaudan, que des archéologues de la société Archeodunum ont étudié deux maisons (fig. 1). Les travaux envisagés sur ces habitations, occupées du milieu du Moyen Âge à nos jours, ont conduit le Service Régional de l’Archéologie de la région Occitanie à demander une étude archéologique du bâti : une belle opportunité d’en savoir plus sur la forme et l’évolution des maisons mendoises. Durant l’hiver 2023, les archéologues ont ainsi analysé l’enchevêtrement de murs d’époques différentes, permettant de mieux faire connaître ce patrimoine.

 

Fig. 1 : Sous la salle 5, redécouverte et exploration d'une cave voûtée.
Fig. 1 : Sous la salle 5, redécouverte et exploration d'une cave voûtée.
Fig. 2 : Localisation des maisons dans la ville de Mende.
Fig. 2 : Localisation des maisons dans la ville de Mende.

Au cœur historique de Mende

Les maisons, sises aux 7 et 9 rue de la Liberté, appartiennent à la trame urbaine de Mende qui s’est formée autour d’un noyau primitif centré sur la cathédrale d’origine carolingienne (fig. 2). Au XIIe siècle, la ville couvre une superficie de plus de 8 hectares protégée par des fortifications. C’est au siècle suivant que sont construites les habitations, ainsi que l’ont démontré nos datations au carbone 14.

Ces maisons s’organisent sur six niveaux : des caves en partie sous la voirie, un rez-de-chaussée, trois étages et un niveau de combles, desservis par un escalier en vis. Les investigations archéologiques se sont concentrées sur les rez-de-chaussée et une salle du premier étage, seuls espaces impactés par les travaux (fig. 3).

Fig. 3 : Plan du rez-de-chaussée (en gris) et des caves (en bleu). Sous la salle 7, la cave déborde sous la rue de la Liberté et sous la Place au Beurre
Fig. 3 : Plan du rez-de-chaussée (en gris) et des caves (en bleu). Sous la salle 7, la cave déborde sous la rue de la Liberté et sous la Place au Beurre
Fig. 4 : Extrait du relevé au scanner 3D. L'échelle chromatique va du plus bas (bleu) au plus haut (rouge).
Fig. 4 : Extrait du relevé au scanner 3D. L'échelle chromatique va du plus bas (bleu) au plus haut (rouge).

Du laser pour étudier le passé

Cécile Rivals et son équipe ont mis en œuvre différents outils, dont un relevé par scanner 3D (fig. 4). Grâce à un rayon laser, cette technologie permet de mesurer et de restituer les volumes d’un bâtiment avec une très grande précision. Elle est particulièrement bien adaptée à l’analyse de volumes complexes, comme c’est le cas ici.

Les archéologues s’attellent ensuite à étudier les élévations des maisons (fig. 5 et 6). Ils cherchent à identifier les modifications, les ajustements et les changements de parti survenus au cours du temps et des travaux. Les matériaux, les marques lapidaires, les traces d’outils et de mise en œuvre documentent les modes de construction (fig. 6 et 7).

Fig. 5 : Salle 1. Relevé phasé du mur nord.
Fig. 5 : Salle 1. Relevé phasé du mur nord.
Fig. 6 : Salle 1. Les archéologues étudient le mur nord.
Fig. 6 : Salle 1. Les archéologues étudient le mur nord.

Porte à accolade et cave légendaire

Sous les enduits muraux récents et les faux-plafonds, plusieurs ouvertures (portes, dont une à accolade (fig. 8), fenêtres, niches) témoignent de nombreux états successifs (fig. 5 et 9). Ces ouvertures révèlent également qu’une partie du rez-de-chaussée actuel a été un espace extérieur à la fin du Moyen Âge. Il s’agissait probablement d’une rue traversant l’îlot selon un axe nord/sud, comme le laisse entendre une mention écrite de la fin du XVIIIe siècle à propos d’un conflit de voisinage.

Les investigations ont permis de redécouvrir une cave (fig. 1). En effet, un habitant de Mende nous a rapporté la “légende” de l’existence d’une cave, bouchée au milieu du XXe siècle. C’est dans la salle 5, sous une dalle de béton, qu’a resurgi un accès. Cette cave, couverte d’une voûte sur croisée d’ogives, appartient à l’état le plus ancien du bâtiment. Son comblement récent proviendrait du démontage d’un four à pain, initialement installé dans la salle 5.

Fig. 7 : Détail d'un bloc taillé. La lumière rasante fait apparaître les traces caractéris-tiques du marteau taillant.
Fig. 7 : Détail d'un bloc taillé. La lumière rasante fait apparaître les traces caractéris-tiques du marteau taillant.
Fig. 8 : Porte à accolade, bouchée ultérieurement.
Fig. 8 : Porte à accolade, bouchée ultérieurement.

Et maintenant ?

Après le départ des archéologues, les travaux ont pu se poursuivre afin que ces deux maisons du centre historique de Mende soient transformées en commerces. De son côté, l’équipe d’archéologues entreprend un long travail d’analyse des données (relevés, photographies, prélèvements, documents d’archive), afin de comprendre comment on a vécu dans ces maisons de Mende à partir du Moyen Âge. Toutes ces informations seront rassemblées dans un rapport d’étude, qui sera remis à l’État et à la municipalité.

Fig. 9 : Salle 5, mur sud, premier étage. Il s'agit du mur le plus ancien de la maison.
Fig. 9 : Salle 5, mur sud, premier étage. Il s'agit du mur le plus ancien de la maison.

Opération d’archéologie préventive conduite en 2023 sur la commune de Mende (Lozère) au 7-9 rue de la Liberté, en préalable à la restauration des rez-de-chaussée.

Prescription et contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie de la région Occitanie.

Maîtrise d’ouvrage : communauté de communes Cœur de Lozère

Opérateur archéologique : Archeodunum (Responsable : Cécile Rivals)

Carnet de fouille : un habitat médiéval fortifié à Beaurepaire (Vendée)

Carnet de fouille : un habitat médiéval fortifié à Beaurepaire (Vendée)

En 2023 une équipe Archeodunum emmenée par Agathe Gaucher fouille un site médiéval au lieu-dit “Les Douves” à Beaurepaire (Vendée) en amont de la construction d’un lotissement communal. Nous vous proposons une plongée en vidéo dans la fouille de ce riche site médiéval à travers un reportage commandé par la commune de Beaurepaire et réalisé par PPID.

L’emprise de l’opération s’est étendue sur 18 000 m². À ce jour, elles ont permis de mettre en lumière un enclos ovoïde d’environ 740 m². Cet enclos médiéval était entouré d’un fossé d’une largeur variant de 2,5 mètres à 4 mètres et d’une profondeur dépassant 1 mètre.
Son rôle semble être à la fois défensif et ostentatoire. L’entrée de cet enclos est marquée par la présence de 4 trous circulaires correspondant aux empreintes des poteaux en bois qui formaient probablement une porte ou un porche.

À l’intérieur de l’enclos, on retrouve l’emplacement d’un talus et les vestiges de nombreux trous, correspondant aux anciens poteaux en bois, qui attestent de la présence de bâtiments.
Le bâtiment principal, d’environ 20 mètres sur 4 mètres, était construit à partir de poteaux en bois pour former sa structure, tandis que les murs et les cloisons étaient constitués d’un matériau périssable, tel que le torchis.
À l’intérieur, une fosse a été découverte, dont la fonction reste encore à clarifier, peut-être un foyer (grill). Une autre fosse d’un mètre de profondeur semble avoir été utilisée pour la conservation des denrées. Peu de mobilier a été retrouvé au cours des fouilles, à l’exception de céramique dont les fragments n’ont pas encore été étudiés, mais qui semblent dater du XIIe siècle, indiquant ainsi une occupation médiévale.

Pour desservir cet enclos, on retrouve les traces d’un chemin étroit bordé de fossés. Des bâtiments sur poteaux forment un axe reliant l’entrée de l’enclos au chemin.
La fonction de ces bâtiments est encore à l’étude.

En outre, des traces de fossés parcellaires associées à l’accès au château moderne de Beaurepaire ont été découvertes. Cependant, aucune preuve ne suggère un lien direct ou une réoccupation entre le site médiéval du XIIe siècle et le château moderne.

Cette fouille présente un intérêt sur le plan régional en raison de la particularité de cette occupation et de sa rareté, laissant supposer l’existence d’un enclos lié à une petite élite. Cette particularité nécessitera une analyse approfondie des résultats de la post-fouille et une mise en relation avec les recherches sur la période médiévale dans la région et au-delà. Le rapport final devrait être publié dans environ 2 ans.

Opération d’archéologie préventive conduite en 2023 sur la commune de Beaurepaire (Vendée), en préalable à la création du lotissement “Les Douves”.

Prescription et contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie Pays de la Loire

Maîtrise d’ouvrage : Commune de Beaurepaire

Opérateur archéologique : Archeodunum (Responsable : Agathe Gaucher)

Étude archéologique du bâti après décroutage des enduits.

Quoi de neuf à Ainay-le-Vieil ?

Quoi de neuf à Ainay-le-Vieil ?

Archéologie et restaurations au château

Depuis janvier 2020, une partie du château d’Ainay-le-Vieil (Cher) fait l’objet d’une importante campagne de restaurations.  A la demande et grâce à une aide financière de la Conservation régionale des monuments historiques, ces travaux sont accompagnés d’une étude archéologique du bâti. Il s’agit de retracer les techniques de construction du château médiéval et du logis de la Renaissance, en mettant en évidence les transformations de ces deux édifices au fil des siècles. Les résultats, très riches, apportent de nouvelles connaissances sur le système défensif du château, la datation du logis et son ornementation.

Angle nord-est du château. Le logis de la Renaissance est enveloppé d’échafaudages.
Angle nord-est du château. Le logis de la Renaissance est enveloppé d’échafaudages.

Un château au plan octogonal

Le château d’Ainay-le-Vieil est communément daté du XIIIe siècle par son architecture dite « capétienne ». Il se compose de murs de courtine crénelés d’environ 11 m de haut dessinant un plan octogonal. Neuf tours d’environ 15 m de haut, au plan généralement semi-circulaire, se dressent à la jonction de ces portions d’enceinte. Deux tours encadrent la porte d’accès au château, accessible aujourd’hui par un pont en pierre qui enjambe les douves remplies d’eau. À l’angle nord-est, on observe une configuration spécifique, avec une tour circulaire qui relie deux courtines formant un angle droit. C’est à cet endroit qu’un logis composé de deux corps de bâtiments et d’une tour d’escalier a été construit à la Renaissance.

Plan du château médiéval et du logis.
Plan du château médiéval et du logis.
Façade nord du logis de la Renaissance aménagée dans la courtine médiévale. Vue de l’extérieur, après restauration.
Façade nord du logis de la Renaissance aménagée dans la courtine médiévale. Vue de l’extérieur, après restauration.

Un vaste programme de restaurations

Les restaurations amorcées en 2020 ont spécifiquement concerné les parements extérieurs du logis de la Renaissance, ainsi que sa charpente. Trois tours et quatre courtines ont été impactées par ces travaux. Au XIXe ou au XXe siècle, l’ensemble des parements a été recouvert d’un enduit gravillonneux qui présentait des décollements importants. Il a donc été décidé de purger cet enduit et d’en réaliser un nouveau. Grâce au décroutage qui a mis à nu les murs, Camille Collomb et ses collaboratrices ont eu l’opportunité d’expertiser l’ensemble des maçonneries médiévales, d’en étudier les détails de la construction et de proposer des restitutions du château ancien.

Tour nord-est : créneau transformé en fenêtre et partie haute d’une archère.
Tour nord-est : créneau transformé en fenêtre et partie haute d’une archère.

Créneaux, archères et hourds : un château médiéval bien protégé

Tout d’abord, l’étude a révélé que, à l’instar des courtines, les tours étaient à l’origine crénelées. Ce n’est qu’après le Moyen Âge que certains créneaux ont été transformés en fenêtres, et d’autres simplement murés.
Les tours et, occasionnellement, les courtines, étaient également pourvues de hautes archères, réparties sur deux niveaux (en bas et en haut des murs). Pour les tours, chaque niveau se caractérisait par trois archères dont le plan de tir permettait de protéger les abords du château. Avec l’introduction des armes à feu, à partir du XIVe siècle, les fentes de tir du niveau inférieur ont été transformées en canonnières.
Enfin, l’étude archéologique a révélé que les tours étaient pourvues de hourds, véritables galeries en bois positionnées en surplomb des murs pour permettre de défendre les abords du château. La restitution des hourds repose sur l’identification des trous d’ancrage des poutres.

Hourds
Dessin de restitution d’un hourd (E.‑E. VIOLLET-LE-DUC, Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle, tome 6, p. 139).
Angle nord-est du château : charpente de la tour et du logis.
Angle nord-est du château : charpente de la tour et du logis.

1502 : la datation précise de la charpente du logis

Le logis en appui contre les murs de l’enceinte médiévale est pourvu, dès l’origine, d’une charpente à chevrons formant ferme. Une datation dendrochronologique (Ch. Perrault, C.E.D.R.E.) révèle que les arbres ont été abattus en 1502. Grâce à ces informations, on peut donc placer avec certitude la construction du logis entre l’extrême fin du XVe et le début du XVIe siècle.

Créatures imaginaires sculptées en façade de l’escalier d’honneur.
Créatures imaginaires sculptées en façade de l’escalier d’honneur.
Aile nord du logis avec sa façade agrémentée de sculptures.
Aile nord du logis avec sa façade agrémentée de sculptures.
Au sommet d’une lucarne : sculpture de singe enchaîné.
Au sommet d’une lucarne : sculpture de singe enchaîné.

De fantastiques ornements

Les façades du logis se caractérisent par de nombreux ornements. L’alternance entre des assises de pierres de taille et des bandes enduites confère un rythme horizontal à l’ensemble, équilibré par les moulurations des fenêtres. Surtout, les façades possèdent une grande quantité de sculptures dont l’ensemble est représentatif de l’époque de la construction. L’escalier d’honneur est particulièrement foisonnant avec des sculptures en bas-relief représentant une végétation peuplée de créatures fantastiques.

Un point central de l’archéologie du bâti : la coactivité entre les différents corps de métier

Lors des chantiers de restauration, différents corps de métier travaillent en parallèle : maçons, tailleurs de pierre, charpentiers, couvreurs ou peintres. Cette coactivité donne lieu à des rencontres propices aux échanges de savoir-faire. Pour les archéologues, ces partages sont riches car ils permettent de confronter les pratiques actuelles des artisans avec les traces laissées par les bâtisseurs depuis le Moyen Âge. Le dialogue autour des découvertes peut également entraîner la modification du projet de restauration par les architectes, afin d’intégrer les résultats de l’étude archéologique. C’est le cas à Ainay-le-Vieil, où la présence des hourds en haut des tours a été matérialisée par des pièces de bois de section carrée placées dans chacun des trous d’ancrage.

Étude archéologique du bâti après décroutage des enduits.
Étude archéologique du bâti après décroutage des enduits.

Et après ?

Les archéologues achèvent leur mission bien avant les autres corps de métier. Une fois le chantier de restauration achevé (printemps 2022), les échafaudages sont déposés et les parements, comme neufs, sont de nouveau visibles par tous. De son côté, l’équipe archéologique s’applique à analyser les échantillons, à compiler la documentation et à rédiger un rapport d’étude qui rassemble la totalité des résultats obtenus sur le terrain. Ces nouvelles données enrichissent considérablement les connaissances sur le château et seront directement transmises au public lors des visites guidées.

Opération d’archéologie du bâti conduite entre 2020 et 2022 sur la commune d’Ainay-le-Vieil, en accompagnement du chantier de restauration du château.

Prescription et accompagnement financier : Conservation régionale des monuments historiques.

Maîtrise d’ouvrage : SCI du château d’Ainay-le-Vieil

Opérateur archéologique : Archeodunum (Responsable : Camille Collomb)

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Une année d’étude sur les remparts de Montbrison

Une année d’étude sur les remparts de Montbrison

Le nez au mur et les mains dans la terre

C’est le long du boulevard Duguet à Montbrison, qu’une équipe de la société Archeodunum a réalisé une étude archéologique des remparts de la ville. Les travaux de confortation et de mise en valeur de ces murs ont conduit le Service Régional de l’Archéologie de la région Auvergne Rhône-Alpes à prescrire une étude archéologique. Durant quinze semaines, d’octobre 2020 à septembre 2021, les archéologues ont ainsi étudié une centaine de mètres linéaires de la fortification et exploré un espace intra-muros accolé au rempart.
Depuis les échafaudages, dans le sous-sol ou dans les archives, les traces recueillies documentent la mise en place des fortifications montbrisonnaises et révèlent la vie quotidienne durant le Moyen Âge et la période Moderne.

 

Le rempart et le collège Victor de Laprade vus depuis le boulevard Duguet, lors de l'arrivée des archéologues
Le rempart et le collège Victor de Laprade vus depuis le boulevard Duguet, lors de l'arrivée des archéologues
Plan général de Montbrison avec localisation de l'étude archéologique
Plan général de Montbrison avec localisation de l'étude archéologique

Grande profondeur et haute précision

L’intervention de Cécile Rivals et de son équipe a pris diverses formes. En coactivité avec les maçons chargés de la restauration, les archéologues ont investi les échafaudages et procédé à l’analyse des murs du rempart sur une longueur d’environ 100 mètres. La stabilité de la fortification faisait l’objet de mesures topographiques régulières grâce à des capteurs fixés dans les murs.
Intra-muros, dans la cour du collège Victor de Laprade, ce sont environ 75 m2 qui ont été explorés, jusqu’à la profondeur impressionnante de 7 mètres. Un dispositif de blindage a apporté toutes les garanties de sécurité pour la fouille de cet espace restreint. Une grue, constamment présente, a permis d’évacuer les déblais, et même de déposer une petite pelle mécanique dans le fond de la fouille, afin de faciliter le travail des archéologues.

Étude de la courtine du XIIIe siècle depuis les échafaudages
Étude de la courtine du XIIIe siècle depuis les échafaudages
Dégagement des fondations de la courtine du XIIIe siècle
Dégagement des fondations de la courtine du XIIIe siècle

Les fortifications : quand l’histoire se confronte à l’archéologie

La ville de Montbrison a été défendue par plusieurs fortifications successives. Au XIIIe siècle, le château et le bourg castral, situés sur la butte basaltique dominant Montbrison, étaient protégés par une enceinte circulaire. À la fin de la guerre de Cent Ans, les Montbrisonnais furent autorisés à construire un grand rempart autour de la ville. Au milieu du XVe siècle, la ville était donc protégée par une fortification longue de plus de 2 km, ponctuée de nombreuses tours semi-circulaires. Des tours semblables furent alors ajoutées contre la courtine du XIIIe siècle, qui montrait déjà des signes de faiblesse.
Ces données connues par des sources historiques ont pu être confrontées à la réalité archéologique lors de l’intervention de 2020-2021. Grâce à l’analyse interne et externe de la tour T1, les archéologues ont notamment pu étudier le mode constructif de la courtine du XIIIe siècle, le rôle de contrefort des tours semi-circulaires ajoutées deux siècles plus tard, et les constantes interventions de consolidation de ces ouvrages fortifiés.

Fouille en cours, avec à gauche, l'intérieur de la tour semi-circulaire ajoutée au XVe siècle
Fouille en cours, avec à gauche, l'intérieur de la tour semi-circulaire ajoutée au XVe siècle
Plan phasé des principaux vestiges
Plan phasé des principaux vestiges

Une occupation dense contre les remparts

Dans l’espace fortifié, c’est un habitat dense qui s’est développé, comme en témoigne le dessin réalisé pour l’armorial de Revel au milieu du XVe siècle. Une portion de maison a été retrouvée enfouie, avec une partie de ses murs et d’un sol pavé. Autre témoignage de la vie quotidienne, une canalisation recueillait les eaux usées du bourg pour les rejeter à l’extérieur de la ville, à travers le rempart.

Traces de la vie quotidienne au XIIIe siècle : habitation et réseau d’eaux usées
Traces de la vie quotidienne au XIIIe siècle : habitation et réseau d’eaux usées
Pot en céramique daté entre la seconde moitié du XVe siècle et la première moitié du XVIe siècle
Pot en céramique daté entre la seconde moitié du XVe siècle et la première moitié du XVIe siècle

Une phase de remblaiement

Durant la période Moderne, lorsque l’aspect défensif des remparts ne fut plus essentiel, les constructions furent rasées et l’espace intra-muros remblayé. Les terres apportées contenaient une grande quantité de déchets : carcasses d’animaux consommés, vaisselle brisée en céramique et en verre, ou encore objets métalliques, tous témoins de la vie quotidienne.
Le jardin de la famille de La Noérie, dont la maison est devenue l’actuel collège Victor de Laprade, occupait cet espace remblayé. Un belvédère fut aménagé à l’emplacement de la tour fouillée, probablement pour profiter de la vue dégagée sur les monts du Forez.

Et maintenant ?

Le collège Victor de Laprade a retrouvé l’intégralité de sa cour de récréation, tandis que les remparts consolidés vont continuer à témoigner du riche passé de Montbrison. Côté archéologie, un long travail d’analyse des données recueillies sur le terrain est en cours (relevés, photographies, objets, prélèvements, documents d’archive). Nos spécialistes se livrent à de minutieuses études, afin de comprendre comment on a vécu autour des remparts de Montbrison à partir du Moyen Âge. Tous les résultats seront réunis dans un rapport final abondamment documenté, et seront présentés au grand public sous la forme d’une conférence.

Opération d’archéologie préventive conduite entre octobre 2020 et septembre 2021 sur la commune de Montbrison (Loire), boulevard Duguet, en préalable à la consolidation et la mise en valeur du rempart.

Prescription et contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie d’Auvergne-Rhône-Alpes.

Maîtrise d’ouvrage : Municipalité de Montbrison

Opérateur archéologique : Archeodunum (Responsable : Cécile Rivals)

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Presque 10 000 ans d’histoire à Cercy-la-Tour (Nièvre)

Presque 10 000 ans d’histoire à Cercy-la-Tour !

Vestiges du Mésolithique au Moyen Âge sur le site des “Fourneaux”

C’est en préalable à l’extension des activités de l’entreprise Cassier qu’une fouille archéologique s’est déroulée au sud de Cercy-la-Tour (Nièvre), au lieu-dit « Les Fourneaux ». Cette opération apporte de nouvelles et solides données sur le lointain passé des lieux. Un passé aux allures de zone de chasse, puis, sept millénaires plus tard, de vie de campagne avec une ferme gauloise, un hameau gallo-romain et des fours du haut Moyen Âge.

Vue générale du site en direction du nord. Au fond, la route de Decize et l’entreprise Cassier.
Vue générale du site en direction du nord. Au fond, la route de Decize et l’entreprise Cassier.
Plan général sur fond de vue aérienne © Google Earth
Plan général sur fond de vue aérienne © Google Earth

À la recherche des Gallo-Romains

La fouille se positionne directement au sud de la route de Decize, qui traverse la commune d’est en ouest. L’opération était motivée par l’agrandissement des locaux de l’entreprise de transport Cassier, un projet accompagné par Nièvre Aménagement. C’est à la suite de la détection de vestiges gallo-romains, du IIIe siècle après J.-C. en particulier, que le Service régional de l’archéologie a demandé l’exploration d’un hectare de terrain.

Colluvions et intempéries

L’emprise occupe un bas de pente, bordé à l’est par un ancien vallon. Cette configuration a engendré de forts colluvionnements recouvrant et séparant les vestiges. Les conditions météorologiques particulièrement éprouvantes durant la fouille (du 25 mai au 23 juillet 2021) ont permis de prendre la mesure de l’ampleur et de la rapidité de ces phénomènes.

450 vestiges et 10 000 ans d’histoire

Le site a été décapé à l’aide de pelles mécaniques afin d’atteindre le toit des vestiges. Sur la totalité de la surface, Jonathan Javelle et son équipe ont documenté près de 450 structures, couvrant une période chronologique plus large qu’attendue, allant du Mésolithique au Moyen Âge.

Coupe d’une fosse mésolithique
Coupe d’une fosse mésolithique, avec sa forme caractéristique dite « à téton », due au surcreusement que l'on perçoit au centre

De bien étranges fosses

Les premiers indices d’occupation remontent au Mésolithique, une période de transition qui voit l’émergence des premiers agriculteurs. Il s’agit de quatre fosses dites « à téton ». Ce nom est lié à leur forme, un creusement circulaire large et profond (environ 1,80 m de diamètre pour une profondeur de 1 m), prolongé en son centre par un étroit creusement. Leur fonction peut être liée à la chasse en tant que piège, le surcreusement ayant éventuellement été pratiqué pour y installer un pieu. Des datations au carbone 14, réalisées après la fin de la fouille, ont donné une fourchette chronologique comprise entre 7 350 et 6 800 av. J.-C.

Les Gaulois sont dans le vallon

C’est dans la zone du vallon, à une profondeur de plusieurs mètres, que plusieurs éléments suggèrent une occupation de la fin de la période gauloise. Quatre trous de poteau particulièrement massifs, de 1,40 m de diamètre pour 1,20 m de profondeur, dessinent l’ossature principale d’un bâtiment sur poteaux porteurs. Il s’agit d’un modèle de bâtiment largement documenté par ailleurs, mais qui apparaît pour la première fois dans la région de Cercy-la-Tour. Cet ensemble est notamment complété par des fossés. Les amphores et la céramique qui en sont issues sont attribuables à la fin de la période gauloise (Ier siècle avant J.-C.).

La chambre de cuisson du four de potier
La chambre de cuisson du four de potier

À l’époque gallo-romaine, un hameau et un potier

C’est la période antique qui est la mieux représentée, avec un mobilier abondant et de nombreuses structures fossoyées (trous de poteau, fosses et fossés). Plusieurs ensembles de trous de poteau semblent former des plans de bâtiments : dans la partie basse du site, c’est ainsi un long bâtiment de douze poteaux de 13 m sur 6 m qui se dessine.
En amont, nos archéologues ont documenté un four de potier bien conservé, avec sa fosse de travail, son alandier et sa chambre de chauffe équipée de piles maçonnées. L’ensemble paraît avoir fonctionné durant la période antique, entre le IIe et le IIIe siècle après J.-C.

Perle en pâte de verre
Perle en pâte de verre
Meule en pierre
Meule en pierre
Fragment de tuile avec une empreinte de pied d’enfant
Fragment de tuile avec une empreinte de pied d’enfant
Traces de pattes de chat et de chien sur une tuile
Traces de pattes de chat et de chien sur une tuile

Six fours à pain du haut Moyen Âge ?

Enfin, six autres fours creusés dans le sol ont été dégagés. Il pourrait s’agir de fours à pain. Leur forme semble renvoyer à une datation au Haut Moyen Âge. Aux alentours, de nombreuses empreintes de poteau évoquent la présence de bâtiments.

Et après ?

La fouille étant terminée, l’aménageur a récupéré son terrain pour y mettre en œuvre son projet. Côté archéologie, une dizaine de nos experts va analyser l’ensemble des données recueillies (photos, dessins, objets, etc.). La céramique, les objets en métal et les ossements vont être étudiés pour parvenir à dater le site et comprendre ses fonctions. Tous les résultats seront rassemblés dans un rapport de fouille abondamment documenté, qui permettra de mieux comprendre comment vivaient nos ancêtres plus ou moins lointains aux abords de Cercy-la-Tour.

Opération d’archéologie préventive conduite de mai à juillet 2021 sur la commune de Cercy-la-Tour (Nièvre), en préalable à l’extension de l’entreprise Cassier.

Prescription et contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie de Bourgogne-Franche-Comté

Maîtrise d’ouvrage : Nièvre Aménagement

Opérateur archéologique : Archeodunum (Responsable : Jonathan Javelle)

Genté

Découverte d’un village du haut Moyen Âge à Genté (Charente)

Découverte d’un village du haut Moyen Âge à Genté

Des visites publiques du site sont prévues le 6 avril 2022 après-midi.

Plus de renseignements ici

Depuis fin janvier 2022, et pour une durée de trois mois et demi, une équipe d’Archeodunum mène une fouille archéologique à l’ouest de Genté (Charente), aux lieux-dits « La Combe des Gourdins » et « Le Fief de la Couture ».
Objet d’une prescription du Service régional de l’archéologie de Nouvelle-Aquitaine motivée par l’agrandissement d’une zone artisanale, la zone à étudier occupe un peu plus de quatre hectares. Les premiers résultats sont spectaculaires : sur un spectre d’occupation couvrant environ 1500 ans, les archéologues ont mis au jour un village du haut Moyen Âge, des bâtiments de l’âge du Fer et des traces d’activités agricoles de ces deux périodes.

Plan général des vestiges
Plan général des vestiges

Plusieurs centaines de vestiges

La fouille a débuté par le retrait de la terre végétale à l’aide de pelles mécaniques, sous la surveillance de l’équipe et la responsabilité de Michaël Gourvennec. Sous cette couche, les archéologues ont recensé 1317 structures (ou vestiges) creusées dans le sol. Dessinant un enchevêtrement parfois complexe, elles appartiennent à différentes époques et se répartissent en grandes catégories : des trous de poteau formant des plans de bâtiments (ultimes restes de constructions en bois), bâtiments à sols excavés ou fonds de cabane, des fossés et des fosses. Chaque vestige est fouillé manuellement, avec une truelle, photographié, dessiné (en plan et en coupe), minutieusement décrit et le mobilier recueilli est inventorié. L’ensemble des informations ainsi obtenu permettra de mieux comprendre les activités de ces communautés.

Fouille des trous de poteau formant un grenier
Fouille des trous de poteau formant un grenier médiéval
Fouille d'un fond de cabane médiévale
Fouille d'un fond de cabane médiévale

Un village du haut Moyen Âge

C’est la période médiévale qui concentre la majorité des vestiges : plus précisément entre le VIe et le VIIe siècle ap. J.-C., selon les premières indications livrées par les objets en poterie . Les vestiges archéologiques permettent d’identifier des plans de bâtiments situés à l’intérieur d’une enceinte fossoyée séparant, tant physiquement que symboliquement, l’espace d’habitation et de stockage de celui de production.
De ces bâtiments, il ne subsiste plus aujourd’hui que les trous de poteau. Ces bâtiments disposaient donc d’une ossature en bois, associant parfois la terre crue pour les murs et la terre cuite pour les toits (tuiles plate type tegulae). Il n’est pas impossible que des toits de chaume aient existé et cohabité avec des toits en tuile mais ils ont disparu sans laisser de traces !
Parmi ces bâtiments on retrouve des bâtiments à quatre poteaux caractéristiques des greniers de la période et des bâtiments plus imposants, à cinq, six voire douze trous de poteaux ! Ceux-ci sont très certainement des bâtiments d’habitation et/ou servant d’étable.
En plus de ces bâtiments sur poteaux, les archéologues ont mis au jours des « fonds de cabane ». Ces vestiges correspondent à des bâtiments dont le sol a été creusé (sur 0,50 m en moyenne) permettant de disposer d’un sol propice à certaines activités artisanales comme le tissage. Ces bâtiments disposaient aussi de poteaux supportant les cloisons et la charpente. Les poteaux peuvent être disposés aux angles du creusement ou bien dans l’axe de celui-ci, les poteaux se trouvant alors en vis-à-vis aux extrémités du creusement.
Au total, on recense 67 bâtiments pouvant appartenir au haut Moyen Âge. Il semble qu’à chaque bâtiment d’habitation corresponde un petit groupe de bâtiment de type grenier. Compte-tenu du nombre de grenier (38 !), l’une des principales activités était l’agriculture. À cela s’ajoute peut-être une activité pastorale et de petites activités artisanales comme en témoigne les « fonds de cabane ». L’ensemble de ces vestiges permettent d’envisager l’existence d’un village durant les VIe-VIIe siècle ap. J.-C.

Vases découverts dans un fond de cabane
Vases découverts dans un fond de cabane

Une ferme de l’âge du Fer

Bien avant le village du haut Moyen Âge, une petite ferme de l’âge du Fer (800-100 av. J.-C.) occupe le bas de la colline de la Combe des Gourdins. Celle-ci se compose de neuf bâtiments, comprenant des bâtiments d’habitation et des bâtiments de stockage. Comme pour l’occupation du haut Moyen Âge, il semble que cette ferme était enclose. Un fossé, peut-être palissadé, délimitait cette ferme à l’ouest.

Pour la suite…

Au sortir du terrain (vers fin avril), la communauté de commune du Grand-Cognac pourra poursuivre l’agrandissement de la zone artisanale de la Combe des Gourdins. Côté archéologie, les experts d’Archeodunum étudieront l’ensemble des données recueillies (photos, dessins, objets, graines, pollens, etc.) afin de comprendre au mieux quelle a été la vie des communautés humaines à des époques bien différentes dans ce secteur de la Charente. En particulier, on saisira mieux l’activité agricole et pastorale durant le haut Moyen Âge. Tous les résultats seront rassemblés dans un rapport de fouille abondamment documenté. À suivre !

Opération d’archéologie préventive du 24 janvier au 29 avril 2022 sur la commune de Genté (Charente), en préalable à l’agrandissement de la zone d’activité de la Couture.

Prescription et contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie de Nouvelle-Aquitaine.

Maîtrise d’ouvrage : Grand Cognac Communauté d’Agglomération

Opérateur archéologique : Archeodunum (Responsable : Michaël Gourvennec)